La 3e édition du Sommet d’Action Montréalais pour la Santé des Hommes GBT2Q (SMASH) s’est déroulée en ligne sous le thème « Au-delà de 2020, des communautés florissantes ». Cette année, le SMASH a opté pour une programmation aérée, se déroulant de 9h à 17h, entrecoupée de longues pauses pour éviter que Zoom ne nous sorte par les oreilles.
Les présentations ont informé les participant·es tantôt par le jeu, tantôt par le partage d’expertise, tantôt par l’entremise de témoignages poignants. Trois membres de l’équipe de la COCQ-SIDA y ont participé et nous offrent leurs impressions de l’événement.
Commençons avec Camille de Vasconcelos, coordonnatrice du programme Droits.
Les 18 et 19 mars derniers, j’ai assisté à mon tout premier SMASH. Je suis très reconnaissante d’avoir participé à cet événement. J’ai beaucoup appris, j’ai ri et j’ai pleuré.
Camille de Vasconcelos
J’ai trouvé particulièrement éclairante la présentation de Mireille St-Pierre et Guillaume Tremblay-Gallant sur les micro-agressions en contexte de dating. Je salue d’ailleurs l’appel à l’introspection qu’elle et il ont lancé à l’endroit des personnes LGBTQ+, en rappelant que, bien que la quasi-totalité des membres de ces communautés ont vécu ou vivront des micro-agressions au courant de leur vie, ils et elles ne sont pas pour autant à l’abri de commettre de telles micro-agressions envers d’autres personnes LGBTQ+.
La présentation a été suivie d’une discussion extrêmement enrichissante sur l’homophobie internalisée et ses différentes manifestations plus ou moins conscientes, sur l’efféminophobie (qui englobe les préjugés, le dégoût et la discrimination envers les hommes – souvent gais – dont la présentation se veut plus féminine), la biphobie, le racisme et la transphobie.
Qu’est-ce qui distingue une préférence d’un fétiche ? Les préférences subjectives d’une personne ne sont-elles pas légitimes ? J’ai beaucoup apprécié la réponse des présentateur·trices à ces questions : toute « préférence » fondée sur un préjugé comporte un aspect déshumanisant, et certains fétiches sont l’expression d’une pensée réductrice et essentialiste — et constituent, en fait, de l’objectification.
Nul·le n’étant immunisé·e contre les préjugés, il importe d’examiner et de questionner honnêtement ses désirs et ses envies. Et plus que tout, il importe de demeurer ouvert·es d’esprit !
Poursuivons avec Ken Monteith, directeur général.
Durant le SMASH, j’ai assisté à une présentation des intervenant·es de l’organisme PIaMP (Projet d’intervention auprès des mineur·es prostitué·es) sur leurs interventions en lien avec le sexting et les ados. J’ai trouvé leur approche rafraîchissante et réaliste, pratique et sans jugement.
Les présentateur·trices ont commencé en abordant une notion de base en matière de criminalisation de la pornographie juvénile : toute photo ou vidéo à caractère sexuel exposant une personne de moins de 18 ans, même soi-même, est interdite par la loi. Celle-ci prévoit cependant des exceptions pour l’échange de matériel entre deux mineur·es d’âge similaire, en l’absence de violence ou intimidation, et en privé.
J’ai apprécié que cette présentation ne soit pas une leçon de droit, ni de moralité (ce qui est trop souvent le cas). L’organisme a simplement affirmé que le sexting peut faire partie de l’affirmation de l’identité sexuelle d’un·e jeune, particulièrement celles et ceux issu·es d’une minorité sexuelle qui peuvent avoir moins d’opportunités d’exprimer leur sexualité ou de trouver une communauté de soutien.Suivant cette affirmation, le PIaMP a émis ces quelques conseils pratiques :
- Envoi d’images : valider le consentement de la personne qui va les recevoir, éviter de montrer le visage ou des marques distinctives, désactiver les identifiants électroniques et même inclure le nom de la personne qui va la recevoir afin de décourager le repartage;
- Réception d’images : valider le consentement de la personne avant d’enregistrer, ou faire connaître son souhait de ne pas recevoir de telles images;
- Repartage : briser la chaîne de repartage, aviser la personne qui y figure et lui offrir du soutien émotionnel ou l’orienter vers des services appropriés.
En terminant, voici quelques ressources utiles :
En somme, une excellente présentation sur une très bonne approche d’intervention !
Ken Monteith
Enfin, voici le compte rendu de Martine Fortin, coordonnatrice de projets.
Dans une présentation sur les thérapies de conversion (TC), on a partagé les résultats de l’étude « Sexe au présent » de 2019-2020. Selon cette étude, la prévalence des TC chez les hommes serait de 10% au Canada et de 7% au Québec. Les organismes LGBTQ+ et les cliniques médicales doivent être sensibles à cette réalité pour mieux répondre aux besoins des survivants et rendre les soins psychologiques plus accessibles. Soulignons qu’en Allemagne, une loi alloue une aide psychologique gratuite aux survivant·es des TC.
Puis, dans une présentation sur les hommes qui exercent le travail du sexe, divers témoignages lus ont permis de faire comprendre qu’en raison de la COVID-19, plusieurs travailleurs du sexe (TDS) ont perdu leurs revenus. Les clients réguliers se font rares et les nouveaux, encore plus. L’équipe du programme TDS de RÉZO a donc acheté des cartes d’épicerie, de pharmacie et fourni des billets d’autobus. Des repas pour emporter ont aussi été distribués et, avec l’arrivée des temps froids, on a loué une salle assez grande pour permettre aux usagers de se réchauffer. Pour en apprendre plus sur le travail du sexe au masculin, on peut visionner le documentaire Hommes à louer (2008), qui a suivi pendant deux ans des TDS usagers de RÉZO.
Une autre présentation portait sur le Prisoner Correspondence Project, fondé en 2007, qui vise à créer des liens entre des membres de la communauté LGBTQ+ incarcérées et des personnes LGBTQ+ non détenues.
Pour s’impliquer, vous pouvez visiter ce lienLes résultats préliminaires d’une étude qualitative sur les conséquences de la COVID-19 sur les hommes qui pratiquent le chemsex ont également été présentés, sous la forme de quatre portraits types :
- 1) arrêt de la consommation;
- 2) maintien de la consommation, avec diminution volontaire du nombre de partenaires sexuels;
- 3) peu ou pas de changements;
- 4) augmentation de la consommation.
On a aussi nommé que, malheureusement, les services non spécialisés dans le chemsex tiennent un discours hétéronormatif et n’abordent pas la réduction des méfaits. Notons qu’un projet de podcast sur le chemsex est en cours. Tout homme (cis ou trans, 18+) qui pratique le chemsex et qui est intéressé à participer peut écrire à : etude.chemsex@gmail.com
L’initiative Ça prend un village a aussi fait une présentation. Il s’agit d’un regroupement de pairs aidants qui militent pour l’amélioration des soins et des services pour les personnes qui se rétablissent d’une dépendance au crystal meth. Les fondateurs (et excellents orateurs) Alexandre et Jean-Sébastien ont mis sur pied un site web et créé des capsules vidéos pour mettre en lumière le vécu de personnes en rétablissement. D’autres projets à venir : une page Instagram, qui permettra d’afficher des portraits des gens qui travaillent auprès des personnes qui consomment; une série de courts billets sur les réalités d’une personne qui consomme, avec des trucs pratiques pour aider; et, un jour, la maison du crystal (rebaptisée la maison village), un endroit fournissant des soins adaptés.
Martine Fortin
Félicitations à toute l’équipe de RÉZO pour une autre excellente édition du SMASH !