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Confidentialité et réseau de la santé


Cocq Sida - Confidentialité et réseau de la santé

Vous pensez qu’un·e professionnel·le de la santé a dévoilé votre statut VIH à une autre personne sans votre autorisation. Vous vous demandez ce que vous pouvez faire dans ce contexte. 

Au Québec, vos droits à la confidentialité, à la dignité et à la vie privée sont protégés par la loi. Ces protections se retrouvent notamment dans la Charte des droits et libertés de la personne (ci-après nommé la « Charte ») et dans le Code Civil du Québec

La protection de la vie privée d’une personne qui reçoit des soins de santé est particulièrement importante. Lorsqu’une personne consulte un·e professionnel·le de la santé ou est admise dans un établissement de santé ou de services sociaux, un dossier la concernant est constitué. Ce dossier contient de l’information à caractère personnel ou médical sur cette personne, qui peut comprendre :

  • Résumé des échanges lors des consultations
  • Raison des visites
  • Diagnostics
  • Résultats de tests

De ce contexte, il n’est pas difficile d’imaginer les lourdes conséquences que pourraient avoir un bris de confidentialité (notamment en matière familiale, d’assurance, d’emploi, etc.). D’où l’importance d’assurer le respect du droit à la confidentialité et une meilleure connaissance des mécanismes de protection de la vie privée dans le système de santé et des services sociaux.

Au Québec, les sources du droit à la vie privée et à la confidentialité de certains renseignements se retrouve à plusieurs endroits, notamment dans le droit d’ordre général, le droit de la santé et le droit professionnel.

1. Le droit à la confidentialité et à la vie privée

La Charte québécoise prévoit que « toute personne a droit à la sauvegarde de sa dignité, de son honneur et de sa réputation[1] ». Elle prévoit aussi le droit d’une personne à sa vie privée[2] et au respect du secret professionnel[3]. Les droits prévus à la Charte québécoise doivent être respectés par tous, tant par les organismes publics que par les entreprises privées et les individus.

Le Code Civil du Québec prévoit aussi que « toute personne est titulaire de droits de la personnalité, tels les droits à la vie, à l’inviolabilité et à l’intégrité de sa personne, au respect de son nom, de sa réputation et de sa vie privée »[4]

Ce faisant, lorsque vous vous rendez dans un établissement de santé ou de services sociaux, vous devez être traité·e avec respect et avec soin, peu importe votre état d’esprit, votre état de santé, votre âge ou vos caractéristiques personnelles. De plus, vous avez droit aux mêmes précautions visant à protéger la confidentialité de vos informations personnelles malgré votre état de santé ou votre condition sociale. 

1.1 Exceptions
Le Code civil du Québec prévoit cependant deux exceptions au droit à la vie privée:

  1. Lorsque la personne consent à ce que certaines informations du ressort de sa vie privée soient connues[5];
    Ex. : Discuter d’un événement de sa vie personnelle avec un journaliste pour que ce témoignage soit ensuite publié dans les médias.
  2. Lorsqu’une loi permet spécifiquement qu’on puisse porter atteinte à la vie privée d’une personne pour des raisons particulières et dans des circonstances précises[6].
    Ex. : Lorsqu’un emploi nécessite que l’employeur vérifie les antécédents criminels d’un·e candidat·e et ce, afin de déterminer si les antécédents ont un lien avec le poste à combler (art. 18.2 de la Charte).

1.2 Définitions
Mais que veut-on dire par confidentialité, dignité et vie privée ?

Confidentialité
Caractère privé d’une information dont l’accès ou la diffusion est limité aux seules personnes à qui elle est destinée ou à celles qui peuvent en prendre connaissance à des fins précises.

Dignité
Valeur inhérente à la personne humaine, qui renvoie à l’estime de soi et au respect auquel une personne a droit.

Vie privée
Tout ce qui concerne l’intimité d’une personne, laquelle comprend des informations et des renseignements la concernant (ex. : état de santé, habitudes de vie, situation familiale et conjugale, lieu de résidence, caractéristiques physiques,  documents personnels, etc.).

2.  L’obligation de confidentialité dans les services de santé et les services sociaux

Les employé·es d’un établissement de santé ou de services sociaux doivent préserver la confidentialité des informations auxquelles ils et elles ont accès dans le cadre de leur travail. Plusieurs lois prévoient la protection des informations contenues aux dossiers des usager·ères.

Le Code civil du Québec prévoit qu’une personne ne peut utiliser l’information confidentielle qu’elle obtient dans le cadre de son travail[7]. Ainsi, les employé·es d’un hôpital n’ont pas le droit d’utiliser ou de propager certaines informations obtenues dans le cadre de leur emploi. Par exemple, si un·e préposé·e aux bénéficiaires apprend, lors de son quart de travail, qu’un·e patient·e est séropositif·ve, il ou elle ne peut pas divulguer cette information à une autre personne, à moins d’avoir obtenu le consentement du ou de la patient·e en question.

La Loi sur la santé et les services sociaux encadre aussi la confidentialité et l’accès aux dossiers des usager·ères des services de santé et services sociaux[8]. Cette loi prévoit notamment que l’information contenue au dossier de l’usager·ère de plus de 14 ans ne peut être divulguée à des tiers (incluant ses parents) sans son consentement[9].

Les établissements de santé et de services sociaux sont également couverts[10] par la Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels. Cette loi permet au public d’avoir accès aux documents détenus par les organismes publics par le grand public. En principe, une personne peut consulter les documents émanant d’organismes publics. Or, les renseignements personnels[11] qui se retrouvent dans les documents détenus par un organisme public sont confidentiels et ne peuvent pas, sauf exception[12], être communiqués à un tiers. Toutefois, vous pouvez présenter une demande auprès d’un organisme public afin d’avoir accès aux informations personnelles qu’il détient à votre sujet.

Les cliniques privées doivent elles aussi s’assurer que les renseignements personnels de leurs usager.ères demeurent confidentiels[13].

2.1 Exceptions
Il existe des exceptions à la confidentialité de certains renseignements contenus au dossier de l’usager·ère.

2.1.1 Consentement à la divulgation

Premièrement, dès lors qu’un usager·ère consent à ce que des renseignements personnels soient partagés avec d’autres personnes, ceux-ci perdent leur caractère confidentiel. C’est l’exception du consentement à la divulgation. L’usager·ère peut aussi limiter son consentement à certaines informations et déterminer précisément à qui ils peuvent être communiqués.

2.1.2 Autres exceptions

  • Pour les cas d’urgence : Un renseignement contenu au dossier d’un·e usager·ère peut être communiqué aux services d’urgence pour prévenir un acte de violence, dont le suicide. Cette exception s’applique seulement « lorsqu’il existe un motif raisonnable de croire qu’un risque sérieux de mort ou de blessure graves menace l’usager, une autre personne ou un groupe de personnes identifiable » et qu’il y a un sentiment d’urgence[14]. Dans ce cas, l’information divulguée ne devra se limiter qu’à ce qui est nécessaire pour prévenir l’acte. Notez que c’est une permission de communiquer, et non pas une obligation.
  • Pour le bon fonctionnement du système de santé : D’autres exceptions à la confidentialité permettent d’assurer le bon fonctionnement du système de santé, notamment pour permettre qu’un·e usager·ère soit transféré·e sans risques vers un autre établissement. Les tribunaux ou le·la coroner peuvent aussi, dans le cadre de leurs fonctions, ordonner que soient divulguées certaines informations contenues au dossier d’un·e usager·ère[15].
  • Pour la protection de certaines personnes vulnérables : Certaines personnes, notamment les personnes mineures ou inaptes[16], n’ont pas un droit à la confidentialité aussi étendu que les autres. Par exemple, les parents d’un·e usager·ère de moins de 14 ans peuvent avoir accès à son dossier médical[17].
  • Pour la protection de la santé publique : Finalement, certaines informations concernant l’usager·ère peuvent être divulguées s’il s’agit d’une question de protection de la santé publique. Par exemple, les médecins qui diagnostiquent certaines maladies précises (dites « maladies à déclaration obligatoire (MADO) ») doivent obligatoirement les déclarer aux autorités de santé publique[18]. Il faut noter que le VIH n’est pas une MADO (voir VIH et maladies à déclaration obligatoire).

Toutes ces exceptions sont cependant restreintes et ne s’appliquent que dans des circonstances bien définies. Si une exception s’applique, la personne qui veut communiquer un renseignement devra le faire dans les strictes limites du cadre législatif approprié. Par exemple, la Loi sur la santé publique limitera les circonstances dans lesquelles un renseignement peut être divulgué[19] pour des raisons de santé publique.

En somme, dans le domaine de la santé et des services sociaux, plusieurs lois prévoient la confidentialité des renseignements personnels contenus au dossier d’un·e usager·ère et visent sa protection. Toutefois il est important de se rappeler qu’il existe des exceptions à cette confidentialité.

3. Le droit au respect du secret professionnel

Plusieurs personnes qui travaillent dans les services de santé ou les services sociaux, qui recueilleront des renseignements sur les usagers·ères et les consigneront à leur dossier sont des professionnels (infirmiers·ères, médecins, psychologues, etc.). Membres d’ordres professionnels, ces personnes ont l’obligation de protéger les renseignements confidentiels contenus aux dossiers des usagers·ères. Cette mesure de protection s’ajoute aux autres mesures précédemment décrites dans tous les cas où l’usager·ère consulte un professionnel.

Le Code des professions prévoit qu’un·e professionnel·le ne peut divulguer les renseignements de nature confidentielle qu’il ou telle obtient dans l’exercice de sa profession[20]. C’est ce qu’on appelle le « secret professionnel ». En plus du Code des professions, différents codes de déontologie[21] régissent la pratique professionnelle. Ils prévoient aussi des règles ayant trait à la confidentialité et la protection des informations que les professionnel·les obtiennent dans le cadre de leurs fonctions.

Par exemple, le Code de déontologie des infirmières et infirmiers leur interdit de participer à des conversations indiscrètes au sujet d’un·e patient·e et des services qui lui sont rendus (ceci inclut des conversations dans les couloirs ou sur les réseaux sociaux)[22].

Le Code de déontologie des médecins prévoit aussi plusieurs mesures à prendre pour préserver le secret professionnel[23]. Il est notamment dit que les médecins, aux fins de préserver le secret professionnel, doivent garder confidentiel ce qui vient à leur connaissance dans l’exercice de leur profession, s’abstenir de tenir ou de participer à des conversations indiscrètes au sujet d’un·e patient·e et de révéler qu’une personne a fait appel à leurs services. En outre, ils et elles doivent prendre les moyens raisonnables pour que les  personnes qui travaillent avec eux et elles préservent, elles aussi, le secret professionnel. Ils ne peuvent non plus divulguer à l’entourage de l’usager·ère un pronostic, même si ce dernier est grave ou fatal, si l’usager·ère n’y consent pas.

3.1 Exceptions
En vertu du Code des professions, un·e professionnel·le ne peut être relevé·e du secret professionnel qu’avec l’autorisation de son·sa client·e ou encore, lorsque la loi l’ordonne ou l’autorise par une disposition expresse[24].

En outre, le Code des professions prévoit qu’un·e professionnel·le peut communiquer un renseignement protégé par le secret professionnel pour prévenir un acte de violence, dont le suicide. Cette exception s’applique seulement lorsqu’il existe un motif raisonnable de croire qu’un risque sérieux de mort ou de blessures graves (blessure physique ou psychologique pouvant nuire qui de manière importante à l’intégrité physique, à la santé ou au bien-être) menace une personne ou un groupe de personnes identifiable et que la nature de la menace inspire un sentiment d’urgence[25]. Dans ce cas, l’information divulguée ne devra se limiter qu’à ce qui est nécessaire pour prévenir l’acte, et ne peut être faite qu’aux personnes exposées à ce danger, à leur représentant·e ou aux personnes susceptibles de leur porter secours. Notez que c’est une permission accordée aux professionnel·les et pas une obligation.

4. Le Bris de confidentialité en santé et services sociaux

4.1 Les bris de confidentialité
Même si la loi prévoit la protection de la vie privée, la confidentialité de vos  dossiers médicaux et le respect du secret professionnel (malgré quelques exceptions), il peut arriver que des informations vous concernant ou des renseignements contenus à votre dossier soient communiqués à des tiers (ex : un membre de la famille, un employeur, etc.) sans votre consentement. C’est ce qu’on appelle un bris de confidentialité

Les bris de confidentialité peuvent prendre plusieurs formes. Il peut par exemple s’agir:

  • de discussions de couloir à propos d’un·e usager·ère et de sa condition médicale qui sont entendues par d’autres personnes qui ne font pas partie de l’équipe de soins
  • de notes au dossier visibles par les personnes qui viennent vous visiter
  • de mesures de ségrégation ou de traitement différenciées

4.2 Recours en cas de bris de confidentialité
Si vous pensez avoir été victime d’un bris de confidentialité, qu’un renseignement contenu à votre dossier a été dévoilé sans votre consentement ou qu’un·e professionnel·le de la santé n’a pas respecté le secret professionnel, vous avez des recours.

Il est recommandé de commencer par discuter avec la personne concernée ou avec un·e responsable de l’établissement afin que des changements soient apportés et que des mesures soient prises pour éviter que des bris de confidentialité se reproduisent.

À cette étape, les comités des usagers et de patients peuvent agir comme porte-parole auprès de l’établissement. Ces comités sont là pour veiller au respect de votre dignité et de vos droits en tant qu’usager·ère des services de santé et services sociaux. 

Si le bris de confidentialité est en lien avec votre séropositivité et que vous envisagez de déposer une plainte formelle, VIH INFO DROITS peut vous accompagner dans vos démarches. 

Vous pouvez aussi solliciter l’aide des Centres d’assistance et d’accompagnement aux plaintes (CAAP). Les CAAP sont des organismes spécifiquement mis en place pour assister les usager·ères dans leurs démarches pour porter plainte auprès d’un établissement public[26]. Il s’agit d’un service gratuit et confidentiel.

4.2.1 Plainte contre l’établissement public de santé et de services sociaux

À qui faire la plainte? Qu’elle vise un·e employé·e (préposé·e à l’accueil, téléphoniste, etc.) ou un·e professionnel·le (médecin, infirmière·er, travailleur·euse social·e, une plainte peut être formulée auprès du Commissaire aux plaintes et à la qualité des services de l’établissement visé. Le Commissaire est responsable de la révision des plaintes des usagers·ères. Indépendant, il est en charge de s’assurer que toutes les plaintes reçues par son bureau soient traitées et ce, dans les délais prescrits. Les plaintes qui lui sont adressées sont confidentielles.

Si votre plainte concerne un·e médecin, un·e dentiste, un·e pharmacien·ne ou un·e médecin résident·e, le Commissaire transmettra votre plainte au ou la médecin examinateur·trice de l’établissement. 

Comment écrire une plainte? Une plainte doit expliquer clairement le bris de confidentialité ainsi que les faits et circonstances qui l’entourent. Habituellement, les plaintes auprès du Commissaire peuvent être formulées par écrit, par téléphone, ou en personne. 

Le service VIH INFO DROITS et les CAAP peuvent vous soutenir dans la rédaction de votre plainte, au besoin.

Quand s’attendre à une réponse? Le Commissaire, ou le ou la médecin examinateur·trice, doivent vous donner une réponse et rendre leurs conclusions au plus tard 45 jours après avoir reçu votre plainte. 

Quels résultats possibles? Le Commissaire, ou le ou la médecin examinateur·trice, pourront suggérer des solutions pour résoudre le problème ou recommander des mesures correctives aux personnes en cause. Ils ou elles pourront aussi émettre des recommandations à l’établissement pour favoriser le respect des droits des usagers et améliorer certaines pratiques. Il faut noter que l’établissement ne sera pas obligé d’appliquer ces recommandations. 

Que faire si vous êtes insatisfait·e de la réponse? Si vous êtes insatisfait·e de la réponse du Commissaire, ou si celui-ci ou celle-ci n’a pas respecté le délai de 45 jours, vous pouvez faire une plainte auprès du Protecteur du citoyen.

Si votre plainte a été acheminée au ou la médecin examinateur·trice, et que vous êtes insatisfait·e de la réponse du ou de la médecin examinateur·trice (ou s’il ou elle n’a pas respecté le délai de 45 jours), vous pouvez vous adresser au comité de révision de l’établissement. Le comité de révision examinera votre plainte et vous avisera de sa décision 60 jours ouvrables après l’avoir reçue.

4.2.2 Demande auprès du Protecteur du Citoyen

Le Protecteur du citoyen traite les plaintes à l’égard des établissements du réseau de la santé et des services sociaux québécois en deuxième recours seulement. Ce n’est que si vous avez d’abord fait une plainte auprès du Commissaire aux plaintes et à la qualité des services que vous pouvez lui demander d’intervenir. 

Le Protecteur du citoyen ne peut traiter les plaintes qui ont été acheminées au ou la médecin examinateur·trice, c’est-à-dire celles qui concernent un·e médecin, un·e dentiste, un·e pharmacien·ne ou un·e médecin résident·e. 

Quand écrire la demande d’intervention? Vous pouvez demander au Protecteur du citoyen d’intervenir jusqu’à deux ans après avoir reçu la réponse du Commissaire aux plaintes et à la qualité des services de l’établissement (ou jusqu’à deux ans après l’extinction du délai de 45 jours qui lui était accordé). 

Comment écrire la demande d’intervention? Vous pouvez formuler votre demande auprès du Procureur du citoyen par écrit, par téléphone, par télécopieur (fax) ou en ligne[27]

Une demande d’intervention auprès du Protecteur du citoyen doit contenir certaines informations :

  • Le nom de l’établissement de santé et de services sociaux qui fait l’objet de la plainte : centre hospitalier, CLSC,  centre jeunesse, résidence d’hébergement pour personnes âgées, maison d’accueil, etc.);
  • une description du bris de confidentialité et des faits l’entourant;
  • le nom, l’adresse et le numéro de téléphone de la personne qui fait la demande.

Le service VIH INFO DROITS et les CAAP peuvent vous soutenir dans la rédaction de votre plainte, au besoin.

Comment sera traitée la demande? Le Protecteur du citoyen accusera réception de votre demande (par courriel, par la poste ou par fax) dans les deux jours ouvrables suivant sa réception. Le Protecteur du citoyen étudiera ensuite la demande afin de déterminer s’il y a lieu de poursuivre les démarches ou non. Il décidera d’intervenir que s’il a des motifs raisonnables de croire que les droits d’une personne ou d’un groupe de personnes n’ont pas été respectés.

S’il décide d’intervenir, le Protecteur du citoyen produira un rapport d’intervention et fera part de ses recommandations à l’établissement en question. Il faut noter que le Protecteur du citoyen n’est pas obligé d’intervenir s’il n’a pas de motif raisonnable de croire qu’une personne a été lésée[28].

Quand s’attendre à une réponse? Ce n’est qu’au moment de la conclusion de votre dossier que le Procureur du citoyen vous fera part de sa décision et/ou de ses conclusions (oralement ou par écrit). Le Protecteur du citoyen prend, en moyenne, entre 60 et 100 jours ouvrables pour traiter une plainte à l’égard des établissements de santé et des services sociaux.

Quels résultats possibles? Si le Protecteur du citoyen conclut qu’il y a effectivement eu des erreurs commises, il transmettra des recommandations à l’établissement visé pour qu’il apporte les correctifs nécessaires. Bien que les établissements ne soient pas obligés d’appliquer ces recommandations, 98 % d’entre elles sont acceptées[29].

4.2.3 Plainte contre une professionnel

Si un·e professionnel·le[30] est à l’origine du bris de confidentialité, vous pouvez aussi porter plainte auprès de son ordre professionnel. Ce recours vous est ouvert, que le·la professionnel·le travaille dans un établissement public ou une clinique privée. Le fonctionnement de chaque ordre professionnel peut varier mais ils suivent pour la plupart la même logique.

Comment écrire la plainte? Pour porter plainte au bureau du syndic de l’ordre professionnel concerné, il faut tout d’abord envoyer une « demande d’enquête ». Cela peut être fait par écrit et souvent, par l’envoi d’un formulaire en ligne. Le syndic de l’ordre professionnel étudiera la demande et décidera ensuite s’il décide d’ouvrir une enquête.

Le service VIH INFO DROITS et les CAAP peuvent vous soutenir dans la rédaction de votre plainte, au besoin.

Comment sera traitée la demande? Si le syndic de l’ordre concerné décide d’enquêter, le ou la professionnel·le visé·e par la plainte sera avisé·e qu’il ou elle fait l’objet d’une enquête. Par la suite, le syndic décidera s’il portera votre plainte devant le conseil de discipline et vous fera parvenir sa décision.

Si le syndic porte plainte devant le conseil de discipline : Le conseil de discipline est indépendant de l’ordre professionnel. Lorsqu’il reçoit une plainte, il entend chacune des parties et par la suite, il détermine si le ou la professionnel·le a bel et bien contrevenu à ses obligations déontologiques en ne respectant pas le secret professionnel.

Si le conseil de discipline est d’avis que le ou la professionnel·le a contrevenu à ses obligations, il peut notamment :

  • Le ou la réprimander
  • Le ou la radier temporairement ou de manière permanente
  • Lui imposer une amende
  • Révoquer son permis d’exercice

Si vous n’êtes pas satisfait·e de la décision du conseil de discipline, vous pouvez demander une révision dans les 30 jours suivant la date de réception de la décision du syndic. Le comité de révision devra vous donner une réponse dans un délai de 90 jours.[31]

Si le syndic décide de ne pas porter plainte devant le conseil de discipline : Si le syndic décide de ne pas porter plainte devant le conseil de discipline, vous pourriez le faire vous-même. Cette démarche est qualifiée de « plainte privée ». Vous pourriez vous représenter vous-même ou être représenté·e par un·e avocat·e. Par contre, il faut noter qu’il peut y avoir des coûts associés à une plainte privée (honoraires, frais de photocopies, de déplacements, etc.).

4.2.4 Recours en droit civil

Formuler des plaintes auprès des établissements ou des ordres professionnels suivant un bris de confidentialité ne vous empêche pas d’avoir recours, en parallèle, aux tribunaux civils (ex : Cour du Québec, Cour supérieure). 

Les recours en droit civil peuvent permettre à une personne d’obtenir une indemnisation (souvent une somme d’argent) pour le préjudice qu’elle a subi suivant une faute commise par un tiers. Pour envisager un recours en droit civil, vous devriez donc être en mesure de démontrer que le ou la professionnel·le ou l’établissement a commis un bris de confidentialité et que cela vous a causé (ou vous cause toujours) un dommage. Puisqu’il est parfois difficile de déterminer si les trois éléments essentiels à un recours en responsabilité civile (faute, préjudice, lien de causalité entre les deux) sont présents, il est préférable de consulter un·e avocat·e ou un service d’information juridique avant d’intenter un recours civil. N’hésitez donc pas à communiquer avec VIH INFO DROITS

Prenez également note qu’il peut aussi exister des recours contre une personne ayant divulgué des informations confidentielles en dehors du réseau de la santé et des services sociaux. Parlez-en avec l’avocat·e du service VIH INFO DROITS ou consulter un·e avocat·e.

5. Dossier santé Québec

Le Dossier santé Québec (DSQ) est un outil électronique qui permet l’informatisation d’une partie des dossiers médicaux des usager·ères du système de santé. Il est cependant distinct du dossier médical de l’usager·ère puisqu’il ne contient que certaines informations (notamment les ordonnances de médicaments, les résultats d’analyses de laboratoire, la liste des médicaments prescrits et les résultats d’imagerie médicale). Le DSQ est un outil utilisé par les professionnel·les de la santé afin d’avoir accès et d’échanger rapidement et efficacement des renseignements. Plusieurs professionnel·les peuvent vraisemblablement y avoir accès : pharmacien·nes, médecins, infirmière·ers auxiliaires, assistant·es en pharmacie, sages-femmes, étudiant·es en médecine, etc. 

Même si le DSQ permet l’échange de renseignements personnels d’un·e usager·ère, il est encadré par la Loi concernant le partage de certains renseignements de santé. L’article 2 de cette loi dicte notamment qu’elle doit être appliquée et interprétée de manière à respecter les principes du droit à la vie privée de la personne et du secret professionnel. De plus, toute personne a le droit de refuser de participer au DSQ, de demander des corrections, d’obtenir une copie des renseignements qui la concernent et de savoir qui a consulté son DSQ.

Pour s’inscrire ou se désinscrire, visitez Dossier santé Québec

Ressources citées dans cette page

[1] Charte québécoise des droits et libertés de la personne, RLRQ c C-12, art. 4

[2] Charte québécoise des droits et libertés de la personne, RLRQ c C-12, art. 5

[3] Charte québécoise des droits et libertés de la personne, RLRQ c C-12, art. 9

[4] CCQ-1991, art. 3

[5] CCQ-1991, art. 35

[6] CCQ-1991

[7] CCQ-1991, art. 2088

[8] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2, art. 17-22

[9] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2, art. 17

[10] Loi sur l’accès aux documents des organismes publics et sur la protection des renseignements personnels, RLRQ c A-2.1, art. 3

[11] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2, art. 54, 56. Un « renseignement personnel » est tout renseignement contenu à un document qui concerne une personne et qui permet de l’identifier.  Le nom d’une personne n’est pas, en soi, un renseignement personnel, sauf lorsqu’il est mentionné avec un autre renseignement concernant la personne ou lorsque sa seule mention, dans un contexte particulier, pourrait révéler un renseignement personnel concernant cette personne.

[12] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2, art. 53 : Les renseignements personnels sont confidentiels sauf si la personne concernée par ces renseignements consent à leur divulgation (si cette personne est mineure, le consentement peut être donné par le titulaire de l’autorité parentale). Ils ne sont également pas confidentiels lorsqu’ils portent sur un renseignement obtenu par un organisme public dans l’exercice d’une fonction juridictionnelle.

[13] Loi sur la protection des renseignements personnels dans le secteur privé, RLRQ c P-39.1, art. 10

[14] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2, art. 19.0.1

[15] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2,art. 19

[16] Une personne inapte ne peut prendre soin de sa personne ou de ses biens. L’inaptitude  peut être partielle ou totale, temporaire ou permanente.

[17] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2,art. 19 et suiv.

[18] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2,art. 19, al. 9.

[19] Loi sur la santé publique, RLRQ c S-2.2, art. 95

[20] Code des professions, RLRQ c C-26, art. 60.4

[21] La déontologie est un ensemble de principes et de règles éthiques qui gèrent et guident la pratique professionnelle.

[22] Code de déontologie des infirmières et infirmiers, RLRQ c I-8, r.9, art. 36

[23] Code de déontologie des médecins, RLRQ c M-9, r.17, art. 20

[24] Code des professions, RLRQ c C-26, art. 60.4

[25] Code des professions, RLRQ c C-26, art. 60.4

[26] Loi sur les services de santé et les services sociaux, RLRQ c S-4.2, art. 76.7

[27] https://protecteurducitoyen.qc.ca/fr/porter-plainte/comment-porter-plainte 

[28] https://protecteurducitoyen.qc.ca/sites/default/files/pdf/Procedure-intervention-sante-services-sociaux.pdf

[29] https://protecteurducitoyen.qc.ca/fr/porter-plainte/le-traitement-de-votre-plainte

[30] Au Québec, il y a 54 professions régies par le Code des professions et 46 ordres professionnels. Parmi les professionnels susceptibles de travailler dans le secteur de la santé et des services sociaux, mentionnons : médecins, infirmière·ers, infirmière·ers auxiliaires, travailleur·euses sociaux·ales, sexologues, chiropraticien·nes, audiologistes, diététistes, inhalothérapeutes, pharmacien·nes, psychologues, sage-femmes. 

[31] Code des professions, RLRQ c C-26, art. 123.4

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Création : novembre 2019