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COVID-19 et VIH


Cocq Sida - Covid-19 et VIH

Ce qu’il faut savoir pour le retour au travail.
Dans les dernières semaines, la pandémie de COVID-19 a chamboulé nos habitudes de vie. Pour plusieurs travailleur·euses, le travail à distance s’est imposé. Alors que le déconfinement se pointe le bout du nez, voici quelques informations à savoir pour les personnes vivant avec le VIH qui envisagent (ou appréhendent) de retourner en milieu de travail dans les prochaines semaines.

1. COVID-19 et VIH : les personnes vivant avec le VIH sont-elles plus à risque de développer des complications ?

Nos connaissances entourant le nouveau coronavirus et les symptômes de la COVID-19 sont encore limitées. Les scientifiques ne savent pas encore si les personnes vivant avec le VIH sont plus à risque de contracter la COVID-19, ni le risque de complications que pose une infection à la COVID-19 chez les personnes vivant avec le VIH. 

Cependant, il semble qu’une personne séropositive sous traitement efficace n’est pas plus à risque de tomber gravement malade de la COVID-191. Pour le moment, rien ne démontre que le risque d’infection ou de complications liées à la COVID-19 soit différent de celui de la population générale pour les personnes vivant avec le VIH en bonne santé, sous traitement antirétroviral efficace et avec un taux normal2 de CD43. Le risque de complications graves découlant d’une infection à la COVID-19 pour ces personnes est faible4. Inversement, une personne séropositive qui n’est pas sous traitement, ou qui présente un faible taux de CD4, pourrait être plus susceptible de développer des complications. 

En outre, le risque de complications liées à la COVID-19 peut augmenter avec l’âge et selon l’état de santé général de la personne. Selon l’Agence de la santé publique du Canada (ASPC), le risque de conséquences graves de la COVID-19 augmente pour les personnes âgées de 65 ans et plus et celles ayant des problèmes de santé sous-jacents5. Ainsi, le risque de complications augmentera pour toute personne, incluant les personnes vivant avec le VIH, âgée de plus de 65 ans et présente des conditions de santé telles que des maladies cardiovasculaires, des maladies pulmonaires ou du diabète6

Les risques de complications découlant d’une infection à la COVID-19 seront également plus élevés pour les personnes immunosupprimées7. Dans un document portant spécifiquement sur la COVID-19 et les personnes immunosupprimées, l’Institut national d’excellence en santé et en services sociaux (INESS) a identifié les conditions d’immunosuppression à risque élevé de complications suivant une infection à la COVID-19. 
Pour consulter l’ensemble des conditions d’immunosuppression identifiées par l’INESS comme étant à risque élevé de complications: cliquez ici.

Concernant le VIH, les conditions d’immunosuppression identifiées par l’INESS comme étant à risque élevé de complications à la suite d’une infection à la COVID-19 sont les “personnes avec le VIH dont le nombre de cellules CD4 est inférieur à 200/mm3 ou qui présentent des manifestations cliniques d’un SIDA symptomatique8.”

Pour l’instant, aucune donnée ne permet de conclure que les personnes immunosupprimées sont plus à risque de contracter la COVID-19. Cependant, celles-ci sont généralement plus vulnérables aux infections bactériennes ou virales. C’est pourquoi les personnes immunosupprimées pourraient être plus susceptibles de développer des complications lors d’une infection à la COVID-199.

2. COVID-19 : quelles sont les recommandations pour les travailleur·euses vivant avec le VIH ?

Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, l’Institut national de santé publique (INSPQ) a identifié les mesures de protection à mettre en place dans les milieux de travail pour les travailleur·euses immunosupprimé·es ainsi que pour celles et ceux atteint·es de maladies chroniques, qui sont les plus susceptibles d’éprouver des complications advenant une infection à la COVID-19. 

L’infection au VIH n’est pas comprise dans les maladies chroniques nécessitant la mise en œuvre de protections supplémentaires10.

Maladies chroniques : travailleur·euses ciblé·es par les recommandations de l’INSPQ

  1. Les travailleur·euses ayant une ou plusieurs des maladies chroniques suivantes :
    • troubles cardiaques ou pulmonaires chroniques “non contrôlés” ou “compliqués” et donc assez graves pour nécessiter un suivi médical régulier ou des soins hospitaliers;
    • diabète “non contrôlé” ou “compliqué” et donc assez grave pour nécessiter un suivi médical régulier ou des soins hospitaliers;
    • troubles hépatiques (incluant une cirrhose) et maladies rénales chroniques “compliquées” et donc assez graves pour nécessiter un suivi médical régulier ou des soins hospitaliers;
    • hypertension artérielle “non contrôlée” ou “compliquée” et donc assez grave pour nécessiter un suivi médical régulier ou des soins hospitaliers.
  1. Une obésité importante (à titre indicatif, IMC ≥ 40);
  2. Une condition médicale entraînant une diminution de l’évacuation des sécrétions respiratoires ou des risques d’aspiration (ex. : un trouble cognitif, une lésion médullaire, un trouble convulsif, des troubles neuromusculaires).

Source : INSPQ, COVID-19 (SARS-CoV-2) : Recommandations intérimaires pour la protection des travailleurs avec maladies chroniques

En ce qui concerne l’immunosuppression, les travailleur·euses ciblé·es sont, sauf quelques exceptions, ceux que l’INESS considère comme étant à risque élevé de complications11. Ainsi, selon l’INSPQ, les travailleur·euses vivant avec le VIH qui ont un nombre de cellules CD4 inférieur à 200/mm3ou présentent des manifestations cliniques d’un SIDA symptomatique sont considéré·es comme immunosupprimé·es nécessitent que des protections supplémentaires soient prises en milieu de travail pour protéger leur santé12

L’INESS mentionne également qu’un médecin traitant pourrait juger qu’une autre condition d’immunosuppression ne faisant pas partie de la liste, chez une personne en particulier, comporte un niveau de risque suffisamment élevé pour justifier un suivi et des mesures particulières13. Dans le doute, consultez votre médecin traitant. 

Immunosuppression : travailleur·euses ciblé·es par les recommandations de l’INSPQ

  1. Personne qui a récemment reçu ou qui reçoit une radiothérapie, une chimiothérapie ou un traitement par inhibiteur de point de contrôle (immunothérapie);
  2. Personne présentant des tumeurs solides malignes non hématologiques;
  3. Personne présentant des troubles hématologiques malins;
  4. Personne greffée d’un organe solide (rein, foie), selon l’une des conditions suivantes :
    • La greffe a eu lieu il y a moins d’un an;
    • Il y a eu un traitement de rejet dans les 6 derniers mois;
    • Le régime d’immunosuppresseurs a été augmenté dans les 6 derniers mois.
  1. Personne greffée du cœur, du poumon, de l’intestin, de l’intestin-foie, de l’intestin-pancréas et autres greffes multiviscérales;
  2. Personne greffée de cellules souches hématopoïétiques (greffe de moelle osseuse, cordon…) selon l’une des conditions suivantes :
  1. Dans les 12 mois suivant la greffe;
  2. Pendant le traitement immunosuppresseur;
  3. Ou en présence d’une réaction du greffon contre l’hôte (GVHD) active.
  4. Personne qui reçoit de hautes doses de corticostéroïdes, en présence de toutes les conditions suivantes :
  1. Le traitement est administré par voie systémique (orale ou intraveineuse);
  2. Le traitement est administré pour une période de 2 semaines ou plus;
  3. La dose est plus élevée que 20 mg de prednisone par jour, ou son équivalent.
  4. Personne qui présente une maladie auto-immune et qui reçoit l’un des traitements suivants :
  1. Agents biologiques qui sont immunosuppresseurs ou immunomodulateurs;
  2. Traitement à l’azathioprine, aux dérivés de l’acide mycophénolique, à la cyclosporine ou au tacrolimus et autres antimétabolites à fortes doses.
  1. Personne qui présente une immunodéficience primaire essentiellement de l’immunité cellulaire;
  2. Personnes avec le VIH dont le nombre de cellules CD4 est inférieur à 200/mm3, ou qui présentent des manifestations cliniques d’un SIDA symptomatique;
  3. Personne présentant une anémie aplasique.

Source : INSPQ, COVID-19 : Recommandations intérimaires pour la protection des travailleurs immunosupprimés

Ainsi, si vous êtes un·e travailleur·euse vivant avec le VIH en bonne santé, sous traitement anitrétroviral efficace, et avez un nombre de cellules CD4 supérieur à 200/mm3, les recommandations de l’INSPQ pour protéger les travailleur·euses immunosupprimé·es ne s’appliquent pas à vous. Les recommandations générales destinées aux employeurs pour prévenir les risques de transmission en milieu de travail sont suffisantes. Ces recommandations sont disponibles ici et ici (milieu de soins).  

Cependant, si vous êtes un·e travailleur·euse atteint·e de une ou des maladies chroniques ciblées ou que vous répondez aux critères de l’immunosuppression, ou que votre médecin est d’avis que votre état de santé représente un niveau de risque élevé, l’INSPQ recommande ce qui suit.

Pour les travailleur·euses de la santé (cas importés)

L’INSPQ recommande la réaffectation de ces travailleur·euses de manière à éliminer :

  • La présence dans un même local (chambre, salle de traitement, etc.) avec les personnes sous investigation ou les cas probables/confirmés de COVID-19;
  • Les soins, les prélèvements, les examens médicaux, les examens paracliniques et les traitements des personnes sous investigation ou cas probables/confirmés de COVID-19;
  • Le transport de personnes sous investigation ou cas probables/confirmés de COVID-19;
  • Les tâches reliées au nettoyage et à la désinfection de l’environnement, du matériel et des effets personnels ayant été en contact avec une personne sous investigation, un cas probable/confirmé de COVID-19;
  • La gestion des dépouilles qui étaient des personnes sous investigation ou des cas probables/confirmés de COVID-19;
  • Les contacts, soins ou traitements des personnes sous investigation ou cas probables/ confirmés de COVID-19 en confinement au domicile ou en hébergement;
  • Toute tâche dans les secteurs ou les établissements déclarés en isolement pour la COVID-19 par les autorités de l’établissement concerné14.

Pour les travailleur·euses dans un contexte de transmission communautaire soutenue

Dans un contexte de transmission communautaire soutenue, l’INSPQ formule des recommandations supplémentaires qui s’appliquent à tous les travailleurs·euses immunosupprimé·es ou atteint·es des maladies chroniques ciblées, quel que soit leur milieu de travail :

L’INSPQ ajoute que s’il n’est pas possible de respecter strictement ces mesures, le ou la travailleur·euse doit être réaffecté·e immédiatement dans un environnement de travail qui est en conformité avec celles-ci. Sinon, un retrait du milieu de travail pourrait être justifié.

Ces recommandations resteront en place pendant la durée de l’épidémie.

Un travailleur·euse peut, malgré ces recommandations, décider de rester en poste dans la mesure où il ou elle a été adéquatement informé·e par son employeur des risques reliés à son travail pour sa santé16

3. Mise en œuvre des recommandations et le droit à la confidentialité des travailleur·euses immunosupprimé·es

En principe, l’état de santé d’une personne — incluant son statut sérologique — est confidentiel. Cependant, un·e travailleur·euse ciblé·e par les recommandations de l’INSPQ et qui souhaite leur mise en œuvre pas son employeur devra nécessairement le justifier par son état de santé. Par exemple, si un·e travailleur·euse de la santé immunosupprimé·e souhaite être réaffecté·e dans un secteur où elle ne risque pas d’entrer en contact avec des cas présumés ou confirmés de COVID-19, elle devra démontrer à son employeur qu’elle remplit les conditions de l’immunosuppression, notamment par une note de son médecin. 

Bien qu’il n’existe encore aucune décision des tribunaux à cet effet, nous revendiquons que le statut sérologique et la liste de médicaments exhaustive d’un·e travailleur·euse ne sont pas des informations qui nécessitent d’être divulgués à l’employeur pour obtenir l’application des recommandations liées à la COVID-19 et travaillons auprès de travailleur·euses, médecins et syndicats en ce sens. 

Selon nous, seule l’information pertinente doit être transmise à l’employeur. Nous vous conseillons de discuter avec votre médecin afin de trouver une formule juste et discrète qui pourra confirmer que vous êtes un·e travailleur·euse ciblé·e par les recommandations de l’INSPQ, mais qui évitera de donner trop de détails sur votre état de santé. 

Si vous avez des questions sur ce qui précède, n’hésitez pas à communiquer avec le service VIH INFO DROITS :

Région de Montréal : 514 844 2477, poste 34
Extérieur de Montréal (sans frais): 1 866 535 0481, poste 34
vih-infodroits@cocqsida.com

Dernière mise à jour : 16 juin 2020

Ressources consultées

CATIE, “La maladie à coronavirus (COVID-19), le VIH et l’hépatite C : Ce que vous devez savoir”, 17 mars 2020.
[Document maintenant hors-ligne]

Les laboratoires utilisent des critères différents pour déterminer ce qui constitue un taux “normal” de CD4, mais la valeur la plus faible se situe habituellement autour de 500 cellules/mm3. Voir CATIE, ibid.

World Health Organization (WHO), “Questions-réponses COVID-19, VIH et antirétroviraux”, 24 mars 2020.
Consultez le document en ligne

CATIE, “La maladie à coronavirus (COVID-19), le VIH et l’hépatite C : Ce que vous devez savoir”, 17 mars 2020, note 1
[Document maintenant hors-ligne]

Agence de santé publique du Canada (ASPC). “Maladie à coronavirus (COVID-19) : Prévention et risques”, 29 mai 2020.
Consultez le document en ligne

European AIDS Clinical Society (EACS); British HIV Association (BHIVA). “Joint statement on risk of Coronavirus (COVID-19) for people living with HIV (PLWH)”, 20 mars 2020.
Consultez le document en ligne (en anglais seulement) 

Pour les personnes vivant avec le VIH, celles dont le nombre de cellules CD4 est inférieur à 200 copies/mm3 ou qui présentent qui présentent des manifestations cliniques d’un SIDA symptomatique répondent aux critères de l’immunosuppression selon l’INESS et l’INSPQ. 

INESS, “COVID-19 et personnes immunosupprimées”, 7 mai 2020, p.4.
Consultez le document en ligne

INESS, “COVID-19 et personnes immunosupprimées”, 7 mai 2020, p.4.
Consultez le document en ligne

10 INSPQ, “COVID-19 (SARS-CoV-2) : Recommandations intérimaires pour la protection des travailleurs avec maladies chroniques”, 23 avril 2020.
Consultez le document en ligne

11 INSPQ, “COVID-19 : Recommandations intérimaires pour la protection des travailleurs immunosupprimés”, 23 avril 2020.
Consultez le document en ligne

12 INSPQ, “COVID-19 : Recommandations intérimaires pour la protection des travailleurs immunosupprimés”, 23 avril 2020.
Consultez le document en ligne

13 INESS, “COVID-19 et personnes immunosupprimées”, 7 mai 2020, p.4, note 8.
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14 INSPQ, “COVID-19 : Recommandations intérimaires pour la protection des travailleurs immunosupprimés”, 23 avril 2020, note 3 à la p 3.
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15 INSPQ, “COVID-19 : Recommandations intérimaires pour la protection des travailleurs immunosupprimés”, 23 avril 2020, note 3 à la p 3.
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16 Loi sur la santé et la sécurité du travail, RLRQ c S-2.1, art. 51.

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Création : novembre 2019