Discrimination et harcèlement
Les personnes vivant avec le VIH sont encore fréquemment victimes de harcèlement psychologique ou de discrimination dans leur milieu de travail. Ces pratiques sont illégales et il existe des recours visant à faire respecter les droits de ceux et celles qui en sont victimes.
1. La discrimination des personnes vivant avec le VIH
La discrimination existe lorsqu’un individu ou une organisation établit une distinction, une exclusion ou une préférence à l’égard d’une personne ou d’un groupe de personnes en raison de caractéristiques personnelles.
Au Québec, la Charte québécoise des droits et libertés de la personne (« Charte québécoise »), la Charte canadienne des droits et libertés (« Charte canadienne ») et la Loi canadienne sur les droits de la personne sont toutes des lois qui protègent contre la discrimination fondée sur une caractéristique personnelle.
La Charte québécoise régit principalement les rapports entre individus ayant cours dans la sphère privée ou publique et énonce, à l’article 10, les motifs interdits de discrimination :
Article 10
« Toute personne a droit à la reconnaissance et à l’exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l’orientation sexuelle, l’état civil, l’âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l’origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l’utilisation d’un moyen pour pallier ce handicap.
Il y a discrimination lorsqu’une telle distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire ou de compromettre ce droit. »
Contrairement à la Charte québécoise, la Charte canadienne s’applique exclusivement en matière d’action gouvernementale (fédérale et provinciale) tandis que la Loi canadienne sur les droits de la personne s’applique uniquement à l’échelle fédérale dans des domaines bien précis. En effet, la Loi canadienne sur les droits de la personne assure le droit à l’égalité notamment dans les domaines suivants: emploi, fourniture de biens, de services, d’installations, ou de moyens d’hébergement destinés au public, de locaux commerciaux ou de logement. Cette loi crée également la Commission canadienne des droits de la personne (« CCDP ») qui est l’homologue de la Commission québécoise des droits de la personne et droits de la jeunesse (« CDPDJ ») créée par la Charte québécoise.
Dans le contexte du VIH/sida, la jurisprudence a considéré que le VIH constituait un handicap, soit un motif prohibé de discrimination au sens entendu par la Charte québécoise.
1.1 Discrimination avant l’embauche
La discrimination est interdite tout au long du processus d’embauche. En matière de VIH/sida, cette interdiction de discrimination s’applique à toutes les questions relatives à l’état de santé qui sont susceptibles d’être posées à un candidat lors de son entrevue, ou dans le questionnaire médical qui lui est soumis.
À cet égard, un employeur est autorisé à poser une question sur l’état de santé d’un·e candidat·e uniquement si cette information s’avère pertinente au regard des exigences de l’emploi. C’est ce qu’on appelle des « exigences professionnelles justifiées ». Elles s’expliquent par le fait qu’un employeur est en droit de savoir si une personne sera en mesure d’effectuer les tâches reliées à l’emploi.
Sachez qu’à ce jour, aucun employeur n’a réussi à démontrer que la séronégativité était une exigence professionnelle justifiée. Ainsi, le simple fait de demander à un·e candidat· s’il ou elle est séropositif·ve au VIH constitue une pratique discriminatoire qui pourrait être sanctionnée. Pour plus d’informations, consultez « Dévoiler en milieu de travail ».
1.2 Discrimination en cours d’emploi
La discrimination, qu’elle soit directe ou indirecte, est également interdite en cours d’emploi.
La discrimination directe survient quand un·e employé·e est traité d’une façon différente en raison de son statut séropositif (exclusion d’une activité – interdiction d’entrer dans un lieu – rejet ou exclusion). De même, selon les lois mentionnées ci-dessus, le statut sérologique d’une personne ne peut servir de motif de sanction.
La discrimination indirecte survient quand une personne souffre, en raison de son statut sérologique, des règles établies par l’employeur, par exemple le nombre restreint de pauses ou de jours d’absence, le rythme de travail trop élevé ou encore l’équipement inadapté. Il arrive que ces règles contraignantes empêchent la personne séropositive d’accomplir certaines tâches et parfois même l’intégralité de son travail, ou encore l’obligent à négocier chacune de ces absences, à quitter son emploi ou entrainent son congédiement.
Or, tout·e employé·e présentant un handicap a le droit d’obtenir des mesures d’accommodements sur son lieu de travail, que ce soit par exemple par le biais d’un ajustement de ses heures de travail, de ses jours de congé ou par une adaptation de son environnement matériel. Parallèlement, tout employeur à l’obligation de mettre en place des mesures d’adaptation pour accommoder un employé qui en ferait la demande. Refuser une telle mesure pourrait s’avérer discriminatoire. Par ailleurs, la discrimination peut intervenir à tout moment et elle peut provenir tant de l’employeur que d’un·e collègue de travail.
1.3 Discrimination dans le contexte du congédiement
Le statut sérologique d’une personne ne peut servir de motif de congédiement. En effet, les salarié·es sont protégé·es par les lois mentionnées ci-dessus, qui prévoient que les employeurs ne peuvent congédier un·e employé·e pour un motif discriminatoire.
Le congédiement pour un motif discriminatoire n’est pas toujours évident à discerner, car il est souvent fait de façon déguisée, l’employeur utilisant souvent un autre prétexte afin de remercier la personne. Si vous pensez que votre congédiement est uniquement basé sur votre statut sérologique, et que vous seriez en mesure de le prouver, des recours existent.
2. Les recours si vous pensez avoir été victime de discrimination
En tant que salarié·e, dépendamment des situations, vous pouvez agir auprès de différents organismes de défense des droits. Selon les circonstances, les personnes victimes de discrimination peuvent obtenir, entre autres, une indemnisation pour les préjudices subis.
Sachez que si vous êtes syndiqué·e et que vous avez été victime de discrimination, vous devez vous tourner vers votre syndicat. C’est à lui que revient la tâche de faire respecter vos droits.
Si vous n’êtes pas syndiqué·e, voici les recours qui s’offrent à vous :
Plainte devant la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse
Un·e employé·e qui pense avoir été victime de discrimination en raison de son statut sérologique peut porter plainte devant la Commission des droits de la personne et de la jeunesse, lorsque son employeur est assujetti à la règlementation provinciale.
Il n’y a pas de durée minimum pendant laquelle la personne doit avoir été employée au sein de l’entreprise pour qu’elle puisse déposer une plainte. Devant la Commission, elle devra prouver que son employeur a établi une distinction ou l’a exclue en raison de sa séropositivité au VIH.
Le délai pour déposer une plainte est de 24 mois (deux ans) suivant la manifestation de la discrimination. Une plainte peut être déposée à la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse par téléphone, télécopieur ou par la poste.
Plainte devant la Commission canadienne des droits de la personne
Un employé qui pense avoir été victime de discrimination en raison de sa séropositivité au VIH peut déposer une plainte devant la Commission canadienne de droits de la personne si son employeur est assujetti à la règlementation fédérale. Quiconque travaillant pour une entreprise ou un organisme réglementés par le gouvernement fédéral (ex. banques, transporteurs aériens, etc.), ou recevant des services de la part d’une telle entité, peut déposer une plainte. Il ou elle devra prouver que son employeur a établi une distinction ou l’a exclu·e en raison de sa séropositivité au VIH. Il n’y a pas de durée minimum pendant laquelle la personne doit avoir été employée au sein de l’entreprise pour que celle-ci puisse déposer une plainte.
La victime a 12 mois (un an) à compter de la manifestation de l’acte discriminatoire pour porter plainte. De plus, sachez que la Commission canadienne a développé une politique spécifique sur la discrimination sur la base du VIH/sida.
Une plainte peut être déposée à la Commission canadienne des droits de la personne par téléphone, télécopieur ou par la poste.
3. Harcèlement discriminatoire et psychologique
Un·e employé·e peut également être victime de harcèlement discriminatoire sur le lieu de travail. Pour pouvoir parler de harcèlement, il faut que plusieurs critères soient réunis : une conduite vexatoire, un caractère répétitif, des paroles, gestes ou comportement non désirés, une atteinte à la dignité ou à l’intégrité, et un milieu de travail néfaste.
Le harcèlement constitue une pratique interdite tant par la Charte québécoise, qui accorde à tous les individus une protection contre le harcèlement fondé sur le handicap, que par la Loi sur les normes du travail, qui prévoit un recours pour les salariés victimes de harcèlement psychologique. Lorsque le harcèlement psychologique a lieu dans une institution fédérale, les employé·es sont protégé·es par le Code canadien du travail.
À titre d’exemple, lorsqu’un·e nouvel·le employé·e remplit un formulaire d’assurances collectives, il doit mentionner son statut sérologique si la question lui est posée. Cette information est confidentielle, et l’assureur n’a pas le droit de la mentionner à l’employeur. Cependant, une fois que la personne bénéficie des remboursements de ses médicaments par l’assurance, ces remboursements entrainent très souvent une augmentation du montant des primes d’assurance tant pour l’employeur que pour les employé·es au sein de l’entreprise. Ce phénomène peut parfois entrainer « une chasse à celui qui coûte cher », un harcèlement de la part des employeurs et/ou des collègues pour exclure l’employé·e du programme d’assurance collective, voire même pour le forcer à démissionner. Or, ces agissements sont interdits et ils peuvent être sanctionnés.
4. Les recours contre le harcèlement
En tant que salarié·e, vous pouvez agir auprès de différents organismes de défense des droits. Attention cependant, une plainte ne peut être faîte qu’une seule fois pour un même comportement de harcèlement. Vous ne pouvez donc pas aller devant plusieurs institutions différentes. Renseignez-vous avant d’agir ! Selon les circonstances, les personnes victimes de discrimination peuvent obtenir, entre autres, une indemnisation pour les préjudices subis.
Sachez que si vous êtes syndiqué·e, et que vous avez été victime de harcèlement, vous devez vous tourner vers votre syndicat. C’est à lui que revient la tâche de faire respecter vos droits.
Si vous n’êtes pas syndiqué·e, voici les recours qui s’offrent à vous :
Recours devant la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST, anciennement la Commission des normes du travail)
L’employé·e qui croit avoir été victime de harcèlement psychologique de la part de son employeur ou d’un collègue peut porter plainte devant la CNESST. Le ou la salarié·e a deux (2) ans après la dernière manifestation pour déposer la plainte.
Une plainte pour harcèlement psychologique peut être faite en ligne ou par téléphone. Les étapes du processus de plainte sont décrites sur le site de La CNESST. La Commission explique les critères de harcèlement psychologique et donne des exemples.
Recours devant la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse ou de la Commission canadienne des droits de la personne.
Ces recours répondent aux mêmes conditions que lors du dépôt d’une plainte pour discrimination tel que décrit ci-dessus.
Lorsque le harcèlement psychologique a lieu dans les institutions fédérales, le Code canadien du travail protège les employés qui peuvent porter plainte à la Commission canadienne des droits de la personne. Il faut alors déposer plainte dans un délai de deux (2) ans depuis l’évènement, à défaut de quoi, la plainte pourrait être refusée.
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Mise à jour novembre 2017